« Mon » trottoir refait pour rien
31 Oct
Durant quelques années, j’ai habité la rue de Chateaubriand, dans Villeray. Un quartier de Montréal que j’aime particulièrement. J’en suis déménagée à l’été 2007 pour aller vivre en banlieue. Je me souviens que l’année d’après, la Ville de Montréal avait entrepris de refaire les trottoirs du tronçon de rue que j’avais habité, soit au Nord de la rue de Castelnau, côté Est. Je me souviens avoir moi-même dû franchir des panneaux de contre-plaqué et autres installations de fortune pour circuler et aller voir la locataire qui habitait mon ancien logement. Je passais y récupérer du courrier. Elle m’expliquait comme elle trouvait ces travaux dérangeants. J’étais étonnée de l’ampleur du chantier, car je n’avais jamais constaté quelque problème que ce soit sur ces trottoirs, que j’ai pourtant arpentés en long et en large durant mon congé de maternité.
Le trottoir, devant cet appartement, était large. Vous savez, c’est ce type de trottoir double qui sépare d’au moins six pieds la rue des petites clôtures de fer forgé. Il était en très bon état. Et on n’en refaisait pas qu’une dalle! Les travaux allaient facilement de la rue De Castelnau à la rue Ferland (mais du côté Est) et peut-être même un peu au Nord de Ferland. C’était tout un branle-bas-de combat sur la rue!
Comme je suis curieuse de nature et que j’aime bien parler avec les gens, je suis allée discuter avec les employés de la Ville. Ce sont toujours des gars gentils, les gars de construction. Ils aiment blaguer et ils sont habituellement assez faciles d’approche. Je me suis donc dirigée vers un petit groupe de travailleurs et leur ai demandé ce qu’ils faisaient, au juste. On m’a orientée vers un autre homme, me disant que c’était à lui que je devais poser mes questions. Bon vivant aux traits sympathiques, l’homme m’a accueillie d’un sourire étincelant : « Mais, on refait les trottoirs!
Moi: Oui, bien sûr, mais est-ce que vous changez la canalisation en-dessous?
L’employé: Non.
Moi: Il y avait un problème d’infrastructure à corriger?
L’employé: Non.
Moi: Est-ce que vous les refaites dans un nouveau matériau, est-ce que les normes ont changé?
L’employé, l’air amusé: Non.
Moi: Je suis passée sur ce trottoir tous les jours durant quatre ans, il était en excellent état. Pourquoi vous le refaites alors?
L’employé: Parce qu’on en a eu la commande. Il devait rester de l’argent à la Ville et il fallait le dépenser. Ils ont décidé de refaire ce trottoir-là. Ça arrive souvent. C’est comme ça. On ne sait pas pourquoi.
Moi: Vous voulez dire que vous avez complètement démoli un trottoir qui était en bon état et que vous le refaites exactement de la même façon?
L’employé: Oui, c’est ça. »
J’étais scandalisée! Outrée de voir tout ce remue-ménage sur la rue pour rien, toute cette obstruction de la circulation, tout cet argent dépensé, tous ces effectifs mobilisés pour refaire un trottoir qui n’en avait pas besoin. Nos taxes venaient d’être augmentées, on étaient en pleine réévaluation foncière, échelonnée sur plusieurs années. Ça coûtait cher. J’ai voulu envoyer une lettre de plainte à la Ville, faire signer une pétition et écrire un article pour crier au scandale! Mais, dans le travail jusqu’aux oreilles, avec un jeune enfant sur les bras et une séparation qui venait d’être prononcée, le quotidien a eu raison de mon indignation et je n’ai rédigé ni lettre ni article.
Si je pouvais témoigner à la Commission Charbonneau, je raconterais cette histoire.
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Articles et liens intéressants sur le sujet:
La Presse: Financement illégal, Tremblay a fermé les yeux
Article sur le témoignage de Martin Dumont à la Commission Charbonneau
Gazette Docs: liste des travaux publics, eau et environnement
« June 4, 2008 affecting Villeray-St. Michel-Park Extension
Octroyer un contrat à Mivela Construction Inc. pour des travaux de reconstruction de trottoirs et de bordures sur l’avenue De Chateaubriand, de la rue Jean-Talon à la rue Villeray. Arrondissement: Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension. Contrat 4 (P.R.R. 2008 – Collectrices). Coût net: 188 550,69 $. Soumission 9501 (6 soumissionnaires). »
Communiqué de presse du service des Infrastructures, transport et environnement du Cabinet du maire:
Pas de vacances en 2008 pour Montréal en chantier
« Depuis 2002, les investissements consentis à l’amélioration des infrastructures routières et à celles de l’eau sont impressionnants. Le mince budget de 126 M$ de l’époque est passé, en 2008, à 401 M$. Les Montréalaises et les Montréalais s’attendent à ce que leur administration municipale gère leurs taxes et leurs impôts de façon responsable et cohérente, aussi mettons-nous l’argent là où c’est nécessaire. »
(Crédit photo: Racineur)
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